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L’amour d’un microbiologiste canadien pour la virologie et son espoir d’un traitement contre la COVID-19

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juillet 24, 2020

Sur Twitter, son pseudonyme dit tout: @VirusNinja.

L’intérêt du Dr Benjamin tenOever pour la virologie remonte aux jours où il étudiait à l’Université McGill, mais son intérêt pour la science découle de sa petite enfance.

Ses parents ont immigré au Canada depuis les Pays-Bas, à la suite d’une campagne de recrutement menée par le gouvernement canadien auprès des agriculteurs hollandais pour les inciter à s’installer à Smithville, Ontario, et à introduire l’élevage laitier dans la région. Son père y est venu pour être le vétérinaire de la ville.

Comptant une population d’environ 5 000 habitants, Smithville se trouve sur les hauteurs d’un ancien littoral niché entre Niagara Falls et Hamilton. Le Dr tenOever décrit la ville de son enfance comme étant très conservatrice et vieux jeu, puisque tout tourne autour d’une confession hollandaise du christianisme : l’Église chrétienne réformée.

Si les dimanches étaient consacrés à l’église, les samedis, le jeune tenOever se joignait à son père qui conduisait alors son camion de ferme en ferme pour y soigner les vaches.

« J’ai vu des trucs un peu fous. À 7 ans, j’ai posé ma main sur le cœur battant d’une vache d’une tonne. Ces expériences ont indéniablement aiguisé mon intérêt pour la science. »

Autant il a apprécié les singularités de son éducation, autant il a saisi les occasions de quitter sa bulle de Smithville. Après sa onzième année, il a fait partie d’un voyage d’échange étudiant en Tasmanie, troquant une petite ville contre une autre, sauf qu’elle était située à l’autre bout du monde. L’été suivant, il a participé à un voyage humanitaire chrétien au Malawi. C’est là qu’il a rencontré la femme qui allait devenir son épouse, mais seulement après une histoire d’amour par correspondance qui a duré dix ans, ce qui prouve probablement que les modes à l’ancienne de Smithville avaient légèrement déteint sur lui.

Avec l’intention de devenir médecin, le Dr tenOever s’est inscrit à l’Université McGill à Montréal pour y effectuer des études prémédicales. Mais lorsqu’il a suivi un cours facultatif en microbiologie, donné par un professeur ayant nettement une passion contagieuse pour les virus, il est immédiatement devenu accro.

Par la suite, il a suivi tous les cours de microbiologie qu’il a pu. Au cours de sa dernière année d’études de premier cycle, il a convaincu un membre du corps professoral de parrainer un projet indépendant d’étude des hantavirus chez la population de rongeurs à Montréal – projet pour lequel il a installé des souricières autour du campus universitaire, dans sa propre maison et dans les parcs montréalais à proximité.

« J’étais en quelque sorte l’exterminateur de McGill, sans savoir que ce que je faisais était vraiment inadéquat. Ce type de recherche exigeait de nombreuses autorisations que je n’avais pas, et des protocoles de sécurité que je ne connaissais pas. »

Finalement, le comité gouvernemental de protection contre les biorisques auquel il s’était adressé pour obtenir les autorisations nécessaires a mis fin au projet. Par ailleurs, bien qu’il n’ait pas découvert le virus, le département de biologie de McGill lui a quand même accordé son crédit d’étude indépendante, et son approche non conventionnelle à la microbiologie a continué sans répit depuis lors.

Alors que la plupart des microbiologistes étudient un virus spécifique et la façon dont il se réplique, le Dr tenOever s’intéressait davantage à la façon dont les cellules reconnaissent qu’elles sont infectées par des virus. À McGill, cela allait être l’objet de ses recherches de doctorat qui l’ont conduit à l’une de ses plus grandes découvertes, celle de kinases activées par des virus, un composant responsable du lancement d’un programme antiviral dans les cellules.

« Quand j’ai commencé mon doctorat, tout ce que nous savions, c’est que chaque cellule infectée a deux tâches principales: un ‘appel aux armes’, induit par une famille de protéines du nom d’interférons, qui envoie un signal à d’autres cellules de fortifier leur défense, et un ‘appel à des renforts’ qui libère différents messagers protéiques qui se dispersent loin du site de l’infection, laissant une piste qui est utilisée par le système immunitaire pour se rendre au site de l’infection, afin que la réponse immunitaire puisse être apportée correctement, a-t-il déclaré. Toutefois, nous étions complètement dans le noir concernant la manière dont les cellules savaient qu’elles étaient infectées par un virus. Mes recherches ont conduit à la découverte d’un composant cellulaire majeur qui est activé par des virus pour orchestrer ce processus antiviral. »

Pour le Dr tenOever, cette découverte a été suffisante pour qu’il termine son doctorat et poursuive des études postdoctorales à l’Université Harvard. Plutôt que de diversifier sa recherche, comme les scientifiques sont souvent encouragés de le faire, il voulait aller jusqu’au bout de sa découverte – et il a commencé à étudier les kinases activées par des virus chez la souris.

Il a terminé son postdoctorat en trois ans, et à 29 ans, il était déjà sur le marché du travail à tenter de démarrer son propre laboratoire. Il est allé à Manhattan pour se joindre au département de microbiologie du Mount Sinaï, un microcosme du dynamisme et de la diversité de New York.

Pour la première fois de sa carrière, il était entouré de virologues. « Je ne voulais pas étudier la virologie de base d’un virus en particulier, je voulais savoir comment tous les virus interagissent avec les défenses des cellules. Être dans un département rempli de virologues a été utile, car j’avais tous les outils pour étudier différents virus, et le faire comme je le voulais – et c’est là que j’ai vraiment commencé à me diversifier et à évoluer dans toutes sortes de directions. »

Le travail du Dr tenOever a évolué vers la fabrication de virus – essentiellement en fractionnant les virus en morceaux individuels et en les reconstruisant, non pas en tant que virus, mais comme thérapies, vaccins et même traitements contre le cancer. Ce travail lui a valu une distinction présidentielle en 2009. Son laboratoire a également obtenu un contrat du Département de la Défense pour étudier un traitement universel contre la grippe, ce qui a exigé que son laboratoire ait une désignation de biosécurité de niveau 3 (BSL3), ce qui est très difficile à obtenir aux États-Unis. Cela est devenu essentiel dans la ruée pour étudier le SRAS-CoV-2, ou COVID-19 qui ne peut être étudié que dans les laboratoires BSL3.

Alors que la menace de la COVID-19 devenait sans équivoque, son laboratoire a pu rapidement se transformer pour se concentrer entièrement sur l’étude du coronavirus. En plus d’examiner comment il affecte différentes parties du corps, le laboratoire a obtenu un deuxième contrat du Département de la Défense pour étudier comment les médicaments approuvés par la Federal Drug Administration (FDA) pourraient être adaptés pour inhiber la COVID-19 et servir de traitement en attendant que le monde dispose d’un vaccin. Et tandis que beaucoup de médicaments font un très bon travail pour inhiber le virus dans les boîtes de Petri, la clé sera de trouver ceux qui peuvent réduire les effets du virus sans trop provoquer d’effets secondaires.

La semaine dernière, le laboratoire du Dr tenOever a découvert qu’un composé prometteur approuvé par la FDA pouvait réduire le virus de 50 % chez les hamsters, voire même bloquer sa transmission. Un autre a montré qu’il pouvait potentiellement éliminer le virus dans les poumons et réduire la gravité du virus à un simple rhume.

Ces découvertes font en sorte que ce microbiologiste canadien d’une petite ville de l’Ontario, alias Virus Ninja, est sur le point de découvrir un traitement pour la COVID-19 qui pourrait changer la donne dans le monde.

Après des mois de dur labeur au laboratoire et beaucoup de temps passé loin de sa femme et de ses deux jeunes filles, alors que la pandémie submergeait New York, le Dr tenOever ne peut dissimuler son enthousiasme et son optimisme quant au fait que la ville qu’il chérit pourrait s’en sortir plus forte que jamais.

« Difficile d’être plus à la fine pointe que cela, alors restez aux aguets ».

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